The Forbidden (UK – 1978)

Réalisation/Scénario : Clive Barker

Interprétation : Peter Atkins, Clive Barker, Doug Bradley...

 

Au milieu de la nuit Clive Barker du PIFFF était projeté le deuxième film de son auteur, après Salome en 1973: The Forbidden, réalisé en 1978. Film expérimental d'une grosse demi-heure, en noir et blanc et presque intégralement en négatif, il contient en germes une série d'obsessions - tant thématiques que visuelles - qui jalonneront l'oeuvre cinématographique de Barker, et qui sont déjà contenues dans ses textes.

Le sexe comme moteur de libération et de cloisonnement, la volonté de trouver une dimension, un espace à la douleur, l'empreinte que laisse cette douleur sur les corps...

Le film se pose d'emblée comme une mise à l'épreuve d'expériences corporelles physiques (le corps qui s'éprouve) et visuelles (celui que l'on regarde). Les corps filmés et montrés en négatif, loin de ne pointer qu'une petite coquetterie de style, disent bien le travail de révision qu'opère Barker sur eux. Invariablement, ils apparaissent comme des surfaces, revêtant de multiples couches. Lorsqu'une figure drapée et masquée enlève un vêtement (c'est particulièrement flagrant lorsqu'il s'agit du gant), elle le fait méticuleusement, en détachant chaque millimètre carré de la peau, comme s'il s'agissait justement d'une couche de peau.

Et lorsque l'on décole petit à petit de très fines pages blanches (presque transparentes) du corps nu d'un homme, les inscriptions et dessins qu'on y avait apposés impriment le corps et ont une valeur identique à un très lent dépeçage. Petit à petit, les feuilles se détachent et le corps est paré d'un tatouage d'écorché. L'encre qui a coulé sur ce corps a également une double valeur en noir et blanc, puisqu'on peut y voir en même temps de l'encre et du sang.

L'effet est visible, mais l'impression d'écorchement est réelle. En voyant cette surface se détacher du corps, on a l'impression de voir une couche de peau s'arracher. Et les motifs d'encre semblent constituer le corps lui-même, quand bien même on sait qu'il ne s'agit que de dessins. Il s'agit clairement d'une première expérimentation visuelle autour du fameux Book Of Blood.

A l'inverse (en négatif!) les corps ne sont parfois que des surfaces planes, aux textures de marbre qui les assimilent à des statues en mouvement. Encore une fois la peau n'est que surface qu'on peut façonner, changer. Mais en opposition à la fusion douloureuse entre encre et sang, ces peaux de marbre sont dématérialisées par la caméra, qui annule persque la vie qu'elles figent.

The Forbidden est une magnifique exploration des corps brimés et libérés par une caméra qui les figure, les transforme ou les défigure, sans rien nous cacher de ses procédés.

The Forbidden2

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