Time Lapse (USA  2014)

Réalisation : 

Scénario : 

Interprétation :  | voir le reste du casting

 

Comme par essence, les films de paradoxe temporel motivent souvent une suspension de crédulité. Comme si le genre galvanisait la quête de l'incohérence, redonnait au fantastique une logique qui empêche de pardonner les erreurs, les événements impossibles.

Time Lapse ajoute à sa petite histoire de paradoxe temporel un obstacle supplémentaire : le figement spatial. Le pitch sort tout droit de Twilight Zone : trois amis découvrent que la maison en face de la leur contient un immense appareil photo dont l'objectif est braqué sur la fenêtre qui donne sur leur salon. A heure fixe, cet appareil qui ressemble tout logiquement à la machine à remonter le temps d'H.G. Wells édite un polaroïd figurant un instant figé... 24 heures plus tard.

Time Lapse

En plus des différentes incohérences qui feront à coup sûr sourire les chercheurs de petite bête du paradoxe temporel, il faut donc avaler un paradoxe spatial : nos personnages ne quittent pas leur petit salon. Tout s'y passe, leur existence s'y déroule exclusivement. Ce qui peut s'avérer franchement ridicule, surtout aux moments où leur petite histoire peut s'y lire, comme un roman photo dont le héros serait autant ce petit salon impersonnel que les personnages qu'il abrite.

Pourtant, tout n'est pas ridicule dans cette histoire, qui comporte même une thématique assez troublante. Flinn, notre personnage principal, vit avec son colocataire et sa petite amie, avec qui il vit une relation relativement platonique. Il est aussi aspirant peintre, mais sa relation avec la toile n'est pas moins platonique. Les photos du futur constitueront une apparition du drame dans son existence un peu morne. Et surtout, elles feront jaillir des angoisses que Flinn désire clairement à force de les craindre. Que signifient ces photos qui montrent son colocataire embrasser, puis faire l'amour à sa petite amie, si ce n'est l'expression du désir un brin tordu que ces événements arrivent ?

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Sa jalousie s'exprime avant que ces photos ne sortent de l'appareil, et Flinn ne cessera de questionner ces images et leur implication, jusqu'à aboutir à un raisonnement dont il est sans doute le seul à comprendre la logique : pour que les événements ne dérapent pas, il faut rester sur la ligne temporelle connue, et donc « poser » devant l'appareil, chaque jour, pour respecter à la lettre la photo du lendemain. Le paradoxe temporel est inversé, il faut désormais se plier aux images du futur, les reproduire pour les produire. En somme, un monde se forme qui est soumis aux dictats d'une image qui lui préexiste. Et Flinn demande donc à ses deux colocataires, conformément à l'image issue directement d'un futur angoissé et fantasmé, de s'embrasser.

Les événements dérapent précisément par une sorte d'invocation forcée, comme si Flinn voulait légitimer ses angoisses en faisant en sorte que ses terreurs se produisent. Cette petite construction d'un monde qui dégénère par lui-même, invitant ses propres éléments perturbateurs en son sein, est donc finalement très bien illustrée par l'idée du huis-clos et de la fenêtre donnant sur l'existence complète de ces trois personnages. Au fond, ces angoisses circulaires sont peut-être fantasmées par un James Stewart en fauteuil roulant armé d'une paire de jumelles, ici métamorphosé en appareil imprimant des photos du futur.

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