Beast
Dans le froid hivernal d'un Copenhague de la haute bourgeoisie, poli et tiré à quatre épingles, Bruno aime Marie d'un amour autodestructeur, elle le lui rend bien. Beast est un film dont le caractère fantastique est à rechercher dans les deux plans qui le suggèrent : du liquide noir qui s'écoule du sexe de l'héroïne sous la douche et l'intérieur du ventre du héros où l'on retrouve la même substance.
Les plus imaginatifs verront un enfant dans le ventre de celui-ci, à débattre... Bien que le début soit plutôt accrocheur et que l'on se prenne facilement d'affection pour le personnage de Bruno, la suite déçoit et cette fable à laquelle on avait envie de croire nous éjecte finalement par son absence d'intérêt. « Tu es une coquille. Tu es vide ! » dira Marie à son ami lors d'une de leurs nombreuses disputes, insulte qui résume le film.
Sous la première couche de vernis esthétique, surgissent ci et là des fissures, notamment quelques faux raccords (les verres remplis sur la table du salon restent identiques alors que les jours défilent) que l'on ne peut que noter tant la peur de s'endormir est présente. Mais ce qui dérange surtout c'est l'ambiance lisse et « jolie » de l'ensemble. D'un style très Télérama, adepte d'une photographie froide où les couleurs se font rares, le film nous plonge dans un univers sans réel relief où le drame d'un couple est semble-t-il assez intéressant pour nous tenir en haleine tout le long de son heure et demi. Enlevez la neige, réintroduisez des couleurs, calmez le personnage principal et vous obtenez à peu de choses près un de ces films sur le drame conjugal de quadragénaires chers à nos productions hexagonales. Le film nous offre une succession de scènes nauséabondes de boutiques de luxe ou de bars d'hôtel dans lesquelles Bruno monte en pression, préparant son pétage de plomb psychotique. Point d'explosion et d'évacuation cathartique que l'on attend avec impatience et qui sera finalement avorté en quelques plans, ajoutant encore à la frustration grandissante qui nous gagne depuis le début du film. Les deux personnages finiront par se dévorer mutuellement (au sens figural) dans une confrontation sans saveur. Quand au spectateur qui a survécu, il en ressort le ventre vide, sur sa faim...