Hasta El Viento Tiene Miedo (Mexique - 1968)

Réalisation/Scénario :

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Singulière impression de découvrir un univers à la fois balisé et extrêmement singulier... Des jeunes filles en uniforme, un pensionnat, une directrice cruelle. Les jupes soigneusement lissées, les poitrines qu'on lit sous le tailleur, les coupes de cheveux désuètes, les visages jeunes et grand ouverts au monde. Cela ne vous rappelle rien ?

Si, bien sûr que si... et pourtant. Si Hasta el viento tiene miedo de Carlos Enrique Taboada ne surprendra guère, de prime abord, le cinéphile épris de fantastique – notamment transalpin – les apparats gothiques y côtoient un art du contrepoint rarement vu ailleurs. Au travers de son histoire de fantôme somme toute assez classique (une ancienne élève, morte, hante un pavillon de l'institution), c'est d'abord un certain rapport aux choses que Taboada veut saisir. Il s'agit, dans une série de vignettes fragiles, de montrer ce regard adolescent dans lequel la peur côtoie l'émerveillement, dans lequel en un instant la joie peut remplacer l'angoisse.

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Ainsi, un numéro d'effeuillage plus potache que coquin peut succéder à une lente montée du suspense chez Taboada, et les rires des jeunes filles venir, pour un temps, couvrir le ricanement strident du vent qui souffle.

Hasta el viento tiene miedo regorge d'images marquantes: ce verrou qui s'ouvre et se ferme dans l'entre-deux des images, ces feuilles qui volent autour des lourds murs du pensionnat, cette lumière bleue et jaune qui semble vivre de l'autre coté des fenêtres, cette silhouette féminine au sommet d'un tour. S'il est peut-être un cran en dessous de l'impressionnant Veneno Para las hadas en terme de mise en scène pure, il lui est en revanche supérieur dans la gestion du rythme et la progression narrative. Dans Hasta el viento tiene miedo, les enchainements de séquence en séquence se font en douceur, avec une lenteur qui ne confine jamais à la pesanteur. Taboada ne filme pas un décorum, il le confronte à l'émergence d'une modernité.

Si l'on traverse la France pour venir se recueillir dans des salles obscures, au fin fond des Vosges, c'est peut-être, finalement, pour ce genre de moments. Après une journée de films récents plus ou moins corrects, plus ou moins interchangeables, entrer dans l'espace Lac aux alentours de 22h, sans trop y croire. En ressortir juste avant minuit, regarder les reflets de la lune sur l'onde calme, et se dire que c'était ça. Que les rêves saisit sur pellicule par un homme dont on ignorait tout jusqu'ici, presque cinquante ans plus tôt, peuvent reémerger en un instant.

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