Don't Knock Twice
Don't Knock Twice (UK - 2016)
Réalisation : Caradog W. James
Scénario : Mark Huckerby, Nick Ostler
Interprétation : Katee Sackhoff, Lucy Boynton, Richard Mylan | voir le reste du casting
Jess, sculptrice au passé tumultueux, a laissé il y a bien longtemps sa fille dans un foyer. Elle cherche aujourd'hui à la récupérer, mais la jeune Chloe n'est pas prête de lui pardonner l'abandon. Cette dernière finira tout de même par frapper à la porte de sa mère, se pensant menacée par une esprit qui la pourchasserait depuis qu'elle a frappée deux fois à la porte de la maison de la sorcière locale.
Avec The Void et The Autopsy of Jane Doe, le nouveau film de Caradog James (après The Machine) confirme une très bonne nouvelle : le retour d'un cinéma d'horreur total, se voulant trip immersif aux allures d'un cauchemar sans fin. Rien n'est jamais tranquille dans Don't Knock Twice, les séquences horrifiques ne sont pas des refrains apparaissant à fréquence régulière, l'horreur infusant la moindre séquence et construit une menace permanente. La première demi-heure, sans oublier son récit, est ainsi une suite ininterrompue de surgissements fantastiques qui puisent à la fois dans une logique cauchemardesque Coscarelienne (la manière dont les séquences s'enchevêtrent et se nourrissent les unes les autres par diverses correspondances), dans la J-Horror (des mains aux longues phalanges désarticulées s'extirpent des lavabos), dans l'épouvante hi-tech récente (un personnage disparaît dans les pixels d'une mauvaise connexion pendant une conversation à distance)...
Surtout, le film joue sur le double tableau d'une épouvante post-EC comics à la James Wan et le film d'horreur indé. Un peu comme si Lucky McKee réalisait une histoire de relation mère-fille pour Jason Blum.
L'horreur se développe donc autour des retrouvailles difficiles entre Jess et Chloe. L'argument type Candyman (avoir frappé deux fois à la porte de la maison d'une morte semble déclencher la vengeance de cette dernière) est très rapidement l'illustration d'un autre double battement à la porte : celui de la fille chez la mère. De son côté, Jess sculpte sans relâche le visage d'une toute petite fille, sans arriver à lui donner une forme. Elle broie donc la glaise comme elle ressasse l'abandon de sa propre fille.
Très rapidement, la menace extérieure à la famille se fait métaphore de ses conflits internes. L'esprit de la vieille dame morte apparaît, le temps d'une séquence effrayante, pour se trancher la gorge. Une fois morte, ce n'est plus son visage mais celui de Jess qu'elle porte. Plus tard, Chloe la verra apparaître dans un miroir, à la place du reflet de sa mère. Plus tard encore, des statues bougeront seules dans l'atelier, et la mère accusera la fille. Cette dernière se montre terrorisée, sans qu'on puisse déterminer avec certitude si c'est à cause du mouvement des statues ou de la réaction de sa mère.
La métaphore tournerait court rapidement sans un détail qui la surélève : Jess est menacée et paniquée aussi. Le fantôme n'est pas uniquement le réceptacle des terreurs liées à l'abandon de Chloe, mais le miroir permanent du chaos des liens qui l'unissent (et la désunissent) à sa mère.
Quelques défauts freinent néanmoins une adhésion totale, et l'un d'entre eux est malheureusement de taille : l'importance donnée par le scénario à une trame policière qui jaillit comme un cheveu sur la soupe en court de route, et qui envahit lourdement le dernier acte du film. Un bémol qui n'empêche pas Don't Knock Twice de ressembler, par instants, à ce qu'on peut attendre d'un vrai film d'horreur, cauchemardesque et humain.