Le petit poucet
Le petit poucet (France - 2011)
Réalisation : Marina de Van
Scénario : Marina de Van, Bertrand Santini
Interprétation : Denis Lavant, Adrien de Van, Rachel Arditi | voir le reste du casting
L'une des surprises de la sélection de Gérardmer 2012 provenait de l'annonce d'un nouveau film de Marina De Van (réalisatrice d'un très beau Dans ma peau) et, surtout, de son titre : Le petit Poucet, programmé à la faveur d'une « séance enfants ». Comment la cinéaste d'un premier film relativement traumatisant allait-elle se sortir d'un tel exercice, sous l'égide d'une production Arte ?
La réponse intervient dès les premiers plans : mal. La première partie du film se déroule comme un mauvais téléfilm de première partie de soirée sur France 3. L'image est très pauvre, on erre dans une forêt moyenâgeuse moyennement crédible en suivant une troupe d'acteurs tous plus mauvais les uns que les autres, manifestement peu dirigés et dans la pauvre bouche desquelles on a placé des dialogues d'un ridicule accompli. Impossible de croire à cette histoire tellement manque le moindre élément un tant soit peu efficace qui enroberait le film d'une atmosphère de conte.
Les choses s'arrangent, à peine lorsque Poucet et ses frères entrent dans la grande maison de l'ogre, campé avec force grimaces par un Denis Lavant bien décidé à nous faire considérer Jack Nicholson comme l'acteur le plus sobre et le plus discret qui ait jamais existé. On rit un peu de sa partition (c'est sans doute volontaire, mais n'aurait-il pas dû, par-dessus tout, effrayer ?), puis très vite le ridicule reprend le dessus. Les filles de l'ogre portent des costumes qu'on croirait achetés à la Foir'Fouille quinze minutes avant le début du tournage, Lavant fait des rêves où il se trouve dans un restaurant contemporain et se livre à une parodie de manifeste végétarien (« manger de la viande revient à manger des êtres humains, et ça, c'est très mal).
Pour être plutôt fidèle, dans l'ensemble, au récit de Perrault, le film se permet une ultime pirouette en forme de conclusion moral(ist)e difficilement compréhensible au terme de ce long-métrage, et achève d'en faire un drôle d'objet assez moche, mal fichu, et au discours assez réactionnaire qui en ferait au final l'inverse d'une séance pour enfants recommandable. On se demande encore, mise à part une obsession certaine pour la nourriture et pour l'idée de manger des êtres vivants, comment l'auteur de cette triste série Z à la française a pu accomplir, il y a seulement quelques années, un film aussi trouble et torturé que Dans ma peau.